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HISTOIRE DE L'EUROPE I : La Renaissance littéraire du VIIIe siècle grec

Dernière mise à jour : 29 sept. 2022


J.-A.-D. Ingres, L'Apothéose d'Homère, 1827, musée du Louvre



Pour l'article précédent, voir ici


La Renaissance des lettres (± -800 – ± -700)


Le terme de « Renaissance » a été appliqué au VIIIe siècle grec (sauf contre-indication, toutes les dates sont avant J-C) en référence à la Renaissance européenne du XVIe siècle de notre ère. Dans une conception cyclique l’Histoire, on a en effet cru pouvoir scander le développement de la civilisation de la Grèce ancienne selon une dialectique similaire à celle l’histoire européenne telle qu’on la conçoit classiquement. A la grandeur de l’antiquité mycénienne aurait succédé un Moyen Age grec[1], avant un retour aux anciens, perceptible dans les épopées homériques et les cultes aux héros, au moment de la Renaissance du VIIIe siècle[2]. Si la cyclicité de l’Histoire paraît aujourd’hui une option naïve et si on ne saurait surestimer la conscience qu’avaient les Grecs de leur passé mycénien, le VIIIe siècle constitue bel et bien un moment intense d’innovations et de profondes mutations. S’amorce une période d’expansion démographique, artistique, commerciale, géographique que la Grèce n’avait pas connu depuis l’époque des palais. Le retour de l’écriture en particulier, qui sort, à nouveau, la Grèce de la préhistoire, doit probablement être regardé comme le phénomène le plus frappant de cette Renaissance.


Si à Chypre, les Grecs avaient conservé, et conserveraient jusqu’au IIIe siècle, une écriture héritée de la Crète de l’Age de Bronze[3], l’Egée était quant à elle restée apparemment complètement illettrée depuis la disparition du Linéaire B (cf. article précédent). Les Phéniciens utilisaient de leur côté un système d’écriture consonantique dont les plus anciennes formes datent des alentours de 1500[4]. On se rappelle (cf. article précédent) qu’on a pu retrouver dès le tournant du IXe siècle une inscription en Phénicien à Cnossos, preuve du contact précoce de la Crète avec cet « alphabet » (le nom vient des deux premières lettres du système : alpha et beta en grec ou ‘alep et bet en Hébreux, langue proche du Phénicien).


Inscription du sarcophage d'Eshmunazor II, roi de Sidon, Ve siècle, musée du Louvre


Paradoxalement, ce n’est pas en Grèce que nous découvrirons la plus ancienne attestation matérielle de l’utilisation de l’alphabet grec, mais en Italie. Il s’agit d’un graffite inscrit sur une petite flasque en céramique, de fabrication locale, découverte dans une fosse du cimetière, latin, d’Osteria dell’Osa, à Gabies, près de Rome. Cette fosse, datée d’environ 775[5] ou 770, avait d’abord reçu le corps d’un homme avant qu’y soit déposé un large dolium, sorte de grande jarre ronde, renfermant l’urne cinéraire d’une femme et plusieurs de ses biens, dont cette flasque. Le graffite qui nous intéresse lit le mot euoin ou eulin, dont la signification reste discutée. Le mot eulin pourrait être le fragment de l’épithète eulinos, « qui file bien », attesté chez Pausanias (8, 21). Dans cette hypothèse, cette inscription grecque, retrouvée, donc, dans un contexte exclusivement latin, aurait pu être une indication laissée par un marchand hellène à destination d’autres voyageurs renseignant une qualité intéressante de la propriétaire de la flasque. Elle constitue en tous cas un témoin de l’expansion grecque vers l’Italie ; c’est à peu près à cette époque que les Eubéens fondent leurs colonies de Cumes et de Pithécusses, un peu plus au sud. La flasque, qui avait reçu la place d’honneur parmi les dépôts funéraires, a pu être placée dans la tombe de sa propriétaire comme une marque de ses vertus ; ailleurs dans le Latium, les tombes féminines recevaient ainsi souvent des fusaïoles, rappels de leur métier de fileuses, apanage des épouses honnêtes.[6]


Inscription d'Osteria dell' Ossa, Museo Nazionale Romano


Il a bien évidemment dû exister d’autres inscriptions plus anciennes, en Egée, qui n’ont pas été retrouvées, que ce soit du fait des hasards de l’archéologie ou de la destruction des matériaux périssables sur lesquels ont pu être rédigées ces inscriptions, comme le cuir ou le bois[7]. 770 doit donc être regardé comme un terminus ante quem pour situer l’invention de l’alphabet grec. L’évolution du kapp phénicien nous permet quant à lui d’estimer un terminus post quem. Dans les environs de 850, cette lettre, composée de trois traits radiants, voit s’allonger vers le bas son trait de droite (𐤊), or c’est ce modèle qui servit à la conception du kappa hellénique. C’est donc vraisemblablement après le milieu du IXe siècle qu’il faut situer l’invention de l’alphabet grec. L’influence de la graphie du waw et du yod telle qu’attestée à Kition aux alentours de 800, sur celle du digamma et le iota brisé, en usage dans l’alphabet grec archaïque, permet peut-être d’abaisser ce terminus post quem au tournant du VIIIe siècle[8], en supposant que ces glyphes n’aient pas existé avant 800 sans avoir été repérés. Une date aux alentours des débuts du VIIIe siècle est de fait généralement retenue pour l’invention de l’alphabet grec, étant donné qu’il n’en existe aucune attestation avant la première moitié de ce siècle.[9]


La spécificité de l’alphabet grec vis-à-vis de l’alphabet phénicien réside d’abord dans l’adjonction des voyelles. Langue sémitique, le phénicien emploie en effet une notation exclusivement consonantique. Certaines consonnes phéniciennes ont ainsi servi de mater lectionis, c’est-à-dire qu’elles se sont vu attribuer, en grec, une valeur vocalique. Les lettres notant les coups de glotte, ‘alep [ʔ] et ‘ayin [ʕ], inconnus de l’oreille grecque, servirent donc à noter l’alpha [a] et l’omicron [o] ; la semi-consonne yod [j] à noter le iota [i] ; les aspirées he [h] et het [ħ] notèrent respectivement l’epsilon [e] et le heta [ε:] ; la semi-vocalique waw [w] servit à la fois à la notation du digamma [w] et à celle de la voyelle upsilon [y]. [10]


Le système des sifflantes phéniciennes s’est vu lui-aussi adapté aux besoins phonétiques helléniques. Le shin [ʃ] servit à noter le sigma [s], le sade [ts] à noter le san [z], alternatif au sigma dans certaines régions, et le zayin [z] à noter le zeta, [ds] ou [sd]. Enfin, le samek [s] servit à la notation du xi [ks].[11]


Plus tard – 740 en est la plus vieille attestation –, de nouvelles lettres seront ajoutées au répertoire phénicien : le phi, le khi et le psi. L’omega enfin ne serait inventé en Ionie que vers la fin du VIIe siècle. [12]


Pour l’époque archaïque et jusqu’au milieu de l’époque classique, on ne peut toutefois pas complètement parler d’un alphabet grec mais de plusieurs. Les alphabets épichoriques, c’est-à-dire régionaux, divergent de fait entre eux sur l’utilisation du xi et des lettres supplémentaires. L’alphabet crétois, dit alphabet vert, ignore tout simplement ces lettres.[13] L’alphabet de l’ouest égéen, dit alphabet bleu, attribue au khi la valeur d’une occlusive vélaire sourde [kh] ; au psi et au xi, il attribue respectivement les sons [ps] et [ks], mais une variante locale, dit alphabet bleu clair, en usage essentiellement en Attique et dans ses environs, ignore ces deux signes. L’alphabet de l’est égéen, dit alphabet rouge, attribue au khi la valeur [ks] et a psi la valeur [kh], mais ignore la lettre xi.[14]



Où l’alphabet a-t-il pour la première fois servi à la notation du grec ? Plusieurs candidats possibles. Certains glyphes exceptionnellement proches de la graphie phénicienne ont été utilisés par les Crétois et les Eubéens, de Grèce et des colonies, comme par exemple le pi courbé en usage en Crète et à Pithécusses. La Crète, en particulier, paraît conservatrice dans son usage de l’écriture ; l’alphabet vert, en se refusant aux adjonctions de nouvelles lettres, paraît plus primitif que les alphabets bleu et rouge. Les Crétois ont pu par ailleurs directement apprendre l’emploi de l’alphabet sans quitter leur île, qui avait, on l’a vu (cf. précédent article), accueillit une minorité phénicienne dès le Xe siècle. Les Eubéens auraient quant à eux pu l’apprendre de leurs expatriés installés à Al-Mina en Syrie. [15] L’hypothèse de l’Eubée est de plus soutenue par ceci que les documents d’épigraphie grecque paraissent, dans la période qui va du VIIIe au début du VIIe siècle, essentiellement eubéens.[16]


La plus vieille inscription athénienne, retrouvée près de la porte Dipylon sur une œnochoé, sorte de pichet à vin, datée d’environ 730-720[17], utilise elle-aussi une graphie proche du Phénicien ; les quelques vers qui y sont inscrit, en hexamètre, et qui signalent le pichet comme la récompense d’une compétition de danse, se lisent de droite à gauche, sur le mode sémitique, et emploient l’alpha couché, le iota brisé, et le pi courbé. Seulement, l’exemple restera unique à Athènes, ce qui a pu faire douter de l’origine attique de l’inscription. [18]

Inscription du Dipylon, Musée Archéologique National d'Athènes


Chypre serait également un bon candidat. Plaque tournante du commerce oriental, hellénisée selon la tradition depuis le XIIe siècle (cf. précédent article), colonisée par les Phéniciens depuis le IXe siècle, l’île était en outre demeurée lettrée durant les siècles obscurs. Si certes, il n’existe à Chypre aucune attestation matérielle de l’écriture entre le XIe et le VIIIe siècle, les syllabaires « commun » et « paphien » qui apparaissent au VIIIe sont, à n’en pas douter, héritiers de l’écriture chypro-minoenne du XIe. Il est donc nécessaire qu’une tradition littéraire confidentielle se soit maintenue sur l’île durant les siècles qui séparent ces systèmes d’écriture.[19] L’origine chypriote de l’alphabet grec permettrait, entre autres, d’expliquer l’utilisation d’une seule lettre, le xi, pour écrire le son [ks], lorsque ce son aurait simplement pu être rendu par la suite des lettres kappa, [k], et sigma, [s]. Le système syllabaire chypriote avait en effet déjà l’habitude de noter d’un seul graphème les sons [ksa] et [kse].[20] L’origine chypriote de l’alphabet permettrait aussi d’expliquer le sens variable de la lecture des inscriptions archaïques, qui tantôt se lisent, de droite à gauche – lévogyre –, tantôt de gauche à droite – dextrogyre –, tantôt même alternativement de gauche à droite et de droite à gauche, une ligne sur deux – boustrophédon. Le syllabaire de Paphos, au sud-ouest de l’île, présente de même un sens de lecture variable, le plus souvent dextrogyre, contrairement aux langues sémitiques, mais également parfois lévogyre. Resterait alors à expliquer pourquoi l’alphabet grec n’est attesté à Chypre qu’à partir du VIIe siècle[21] et pourquoi il ne s’y est pas imposé avant le IIIe [22].


Inscription chrypriote de la tablette d'Idalion, Ve siècle, Idalion, Chypre


Reste enfin la question de ce qui a motivé l’emprunt de l’alphabet. Quel usage ont d’abord eu les Grecs de l’écriture ? Les Phéniciens ayant essentiellement usage de l’alphabet pour la logistique et la comptabilité économique, on a pu supposer que l’alphabet aurait d’abord été adopté par les marchands grecs en rapport avec ceux de Phénicie ; l’alphabet grec aurait ainsi d’abord eu une destination économique.[23] On a vu quelle fonction marchande avait éventuellement pu avoir l’inscription du cimetière d’Osteria dell’Ossa ; de nombreuses inscriptions ont par ailleurs fait office de marques de propriété[24]. Mais l’absence de système de numérotation en Grèce avant le VIe siècle rend difficile d’imaginer que l’écriture ait pu avoir une fonction très développée au sein des structures économiques du VIIIe siècle[25].


Il est possible aussi de conjecturer une origine « scolaire ». L’ordre des lettres de l’alphabet grec correspond de fait à celui l’alphabet phénicien, ce qui implique un enseignement codifié de l’alphabet qui s’est transmis de Phénicie vers la Grèce. De même, le nom des lettres grecques – « alpha », « beta », … – ont une signification précise dans les langues sémitique – « ‘alep » désigne un bœuf ; son glyphe en était une représentation stylisée dans les plus anciennes formes de l’alphabet[26] – mais n’en n’ont aucune en grec, ce qui implique à nouveau qu’ils ont dû être appris tels quels. Cette hypothèse « scolaire » de la transmission de l’écriture pointe la responsabilité, dans l’invention de l’alphabet grec, d’un groupe de scribes grecs vivant en milieu bilingue.[27] Ces scribes auraient pu d’abord utiliser l’alphabet pour retranscrire le Phénicien avant de l’adapter à la notation du grec.[28]


Il apparaît en tous cas certain que l’alphabet grec fut rapidement destiné à fixer la poésie par écrit, ce qui le distingue radicalement du Linéaire B et même de l’alphabet phénicien, écritures de comptables. Le corpus épigraphique, qui s’étoffe dans la deuxième moitié du VIIIe siècle, compte à partir de cette période de nombreux exemples de vers inscrits sur de la vaisselle. C’était le cas, on l’a signalé, de l’inscription du Dipylon à Athènes. C’est le cas aussi de la très célèbre coupe de Nestor, un des plus vieux artéfacts de la littérature grecque, daté d’entre 735 et 720. Cette coupe, produite à Naxos, a été importée au large de l’Italie par la colons eubéens de Pithécusses. On peut y lire, de droite à gauche, cette inscription gravée sur place :


« Je suis la coupe de Nestor, commode pour y boire/La coupe de Nestor est commode pour y boire. Qui boira à cette coupe, sera aussitôt pris du désir d’Aphrodite à la belle couronne. »[29]


Retrouvée dans la tombe d’un jeune garçon de 10 ou 14 ans, l’inscription serait l’évocation du monde des banquets et des amours qu’il n’aura jamais pu connaître.[30]


Coupe de Nestor, Museo Archeologico di Pitecusa


Quels que soient les motifs pour lesquels les Grecs ont d’abord emprunté l’alphabet, ces inscriptions poétiques indiquent que sa diffusion à travers l’Egée et vers l’Italie, dans des régions qui n’entretenaient pas nécessairement de rapport étroits avec la Phénicie, a été le fait, entre autres et peut-être d’abord, de l'aristocratie, fascinée par l'orient[31] et aimant à déclamer de la poésie au cours de ses banquets, ses symposia.[32] La référence à Nestor, héros de la guerre de Troie, relève de la célébration épique de l’aristocratie guerrière et de ses valeurs.


Les épopées homériques


Les épopées homériques faisaient dans l’antiquité partie de grands cycles épiques dont ils sont aujourd’hui tout ce qu’il nous reste. Récits des exploits d’héros surhumains, au contact des réalités suprahumaines, les épopées renvoyaient dans un « passé exemplaire », hors du temps et de l’histoire, toutes les valeurs – la bravoure, la prudence, la ruse[33] et surtout la force physique – de l’aristocratie guerrière des Grecs. L’agon, la compétition, la lutte, relève la valeur morale et physique des hommes, leur arété ; les rois et les princes, protagonistes de l’intrigue, doivent se surpasser, et surtout surpasser leurs ennemis, humains ou monstrueux, pour éviter la mort noire le plus longtemps possible, c’est-à-dire aussi longtemps que les dieux le leur permettent.


L’Iliade nous fait le récit de la colère d’Achille qui, à la neuvième année de la guerre de Troie, refusa obstinément le combat, pour l’affront que lui fit Agamemnon : le roi lui avait pris Briséis, sa captive. Le prince phtidien ne retournerait se battre qu’à la mort de Patrocle, son ami, qu'il brûlerait de venger en assassinant le pieux Hector, sur le bûcher duquel s’achève le poème.


Thétis donne à son fils Achille ses armes nouvellement forgées par Héphaïstos, détail d'une hydrie attique à figures noires, circa 575--550, musée du Louvre.


D’autres épopées, que les Anciens attribuaient volontiers à Homère, racontaient les autres épisodes de la guerre de Troie[34]. Si l’Iliade se place dans la neuvième année du combat, c’est que c’est dans cet instant symbolique, qui précède l’accomplissement des desseins divins à la dixième année, que culmine la violence du conflit[35]. La mort est omniprésente ; plus que jamais les hommes semblent les objets des querelles futiles de puissances divines, libres des souffrances humaines, que le poète, au milieu des massacres, met volontiers en scène dans des farces. La mort effrayante, dont le terme est arrêté pour chacun par la balance divine, qui, de deux combattants, discrimine celui qui doit vivre de celui qui doit mourir, est tant révélatrice de la bravoure des hommes, et surtout de leur habileté à la dispenser, la mort, que des faveurs dont les dieux les entourent. L’intervention divine subtilise ainsi au trépas plusieurs héros privilégiés, tel Enée, qu’Apollon sauve de Diomède (5.311-453) et que Poséidon enlève à Achille (20.288-352). La mort fixe également une sorte d’instantané des valeurs des héros : le poème rappelle plusieurs fois[36] qu’Achille, à une vie longue et paisible en son pays natal, avait délibérément préféré une vie brève mais glorieuse. Sa mort annoncée, racontée dans l’Ethiopide, garderait à jamais de lui le souvenir d’un homme jeune, vaillant, fort, au sommet de ses moyens : le héros aristocratique par excellence.


L’Odyssée faisait quant à elle partie des Nostoi, les « Retours », qui racontaient comment les différents héros grecs étaient rentrés en leur pays. C’est un récit de la fidélité qui nous narre tout à la fois la quête de Télémaque à la recherche de son père, la résistance de Pénélope aux avances de ses prétendants, et la lutte d’Ulysse, leur père et époux, qui pendant dix ans peine pour rentrer en sa patrie, face à la nature hostile et monstrueuse jetée contre lui par la colère de Poséidon. Lorsque, pour la gloire, Achille préféra, à une vie longue, une mort précoce loin de son pays, Ulysse est le héros qui, à l’immortalité en compagnie de la belle nymphe Calypso, préféra, contre toutes les peines, rentrer en son pays et vieillir avec son épouse.


Ulysse lié au mât de son navire pour ne pas céder au chant des sirènes, Musée national archéologique d'Athènes


Ces poèmes ont derrière eux une longue tradition orale. Le langage épique dans lequel ils sont composés s’identifie essentiellement au dialecte des Ioniens micrasiatiques mais on y décèle aussi des substrats éoliens et achéens, notamment dans les expressions de la diction formulaire, technique qui recourt à de nombreuses formules figées, comme « Achille aux pieds légers » ou « Athéna aux yeux pers », pour composer facilement des vers[37].


Ainsi, chez Homère, l’expression νήεσσι θῇσι (nèessi thèsi), « aux navires rapides » (datif pluriel), relève d’une forme composite jamais parlée entre l’ionien νησί (nesi) et l’éolien νάϝεσσι (nawessi) ; le verbe ἕμμεναι (emmenai), alternatif métrique à l’ionien εἶναι (einai), « être », a été emprunté quant à lui au dialecte éolien de Lesbos dont la désinence -μεναι (-menai) est typique. Les infinitifs ἴμεν (imen), « aller », ἔμμεν (emmen), « être », φερέμεν (pheremen), « porter », sont des formes propres aux dialectes éoliens de Thessalie et de Béotie. La présence de ce dialecte continental suggère que ce sont les Eoliens qui apportèrent d’Europe l’épopée, au moment de leur départ pour l’Anatolie (cf. article précédent)[38]. L’importance d’Achille, héros thessalien, s’explique peut-être ainsi[39]. Il faut aussi remarquer que la Troade est voisine de l’Eolide.


Plusieurs mots proto-achéens, dialecte des Mycéniens, se retrouvent également dans l’Iliade et l’Odyssée, tels ἄρουρα (aroura), « terre arable », αἶσα (aisa), « portion », ου ιᾶτήρ (iathèr), « médecin », qui appartiennent tous au vocabulaire des tablettes en linéaire B ; de même l’utilisation de la désinence -φι, typique du locatif mycénien.[40] Ces épopées des Argiens où le riche Agamemnon, roi de Mycènes, tient le premier rôle parmi les Achéens, ont ainsi sans surprise été chantées dans le monde Mycénien, et sans doute d’abord en Argolide. C’est ce qui explique les surprenantes réminiscences de l’Age du Bronze dans l’épopée, comme le casque en dents de sanglier de l’Iliade (10.260-265), les chars ou, bien sûr, les armes de bronze.


Un casque en défenses de sanglier, cicra 1450-1400, Musée archéologique d'Héraklion.


On peut même supposer une origine étrangère aux récits épiques. En effet, la mesure de l’épopée, l’hexamètre dactylique – qui repose sur une répétition du rythme d’une syllabe à voyelle longue suivie de deux syllabes à voyelle brève (c’est cette mesure qu’on appelle un ‘’dactyle’’) –, ne s’accorde guère aisément avec la langue grecque, dont le rythme préférait les iambes (longe-brève) et trochées (brève-longue)[41]. Les épopées homériques sont ainsi pleines de constructions surprenantes pour la morphologie du Grec, exigées par cette métrique mal adaptée. Ainsi, par exemple, ἀνδρειφόντῃ (andreiphont̀è), « le tueur d’homme », au vers 651 du deuxième chant de l’Iliade, substitue le radical ανδρει- à la base attendue ανδρο- – comme dans l’adjectif homérique ἀνδροφόνος (androphonos), « qui tue des hommes » –, ce afin d’artificiellement obtenir les deux brèves ‘’ε-ι’’ nécessaires à la construction du dactyle[42]. Les expressions formulaires et la superposition de plusieurs dialectes différents répondent également aux contraintes rigides du mètre. Si les poèmes iambiques et trochaïques, qui ont une parenté avec les vers védiques, doivent avoir une origine indo-européenne, l’épopée dactylique est sans pendant exact en dehors de la Grèce et il n’est pas impossible de lui imaginer une origine préhellénique, minoenne peut-être[43].


Les épopées n’étaient ainsi pas des chants populaires. Les aèdes qui devaient improviser leur chant sur le thème d’un épisode épique déjà maintes fois racontés, dans le cadre des symposion ou des compétitions – comme celles des jeux funèbres auxquels Hésiode rapporte avoir chanté (Trav. et Jours, 650-659) –, étaient contraints par une métrique lourde, qui exigeait d’eux une expertise, une connaissance aboutie, tant du fonds mythologique que leur public connaissait et attendait, que des expressions formulaires figées, tirées d’un répertoire antique, parfois artificiel, puisant dans de multiples dialectes, nécessaire au rythme de leur chant.


Toutefois, Homère, si ce nom a un jour été porté, ne compose pas tout à fait comme les autres aèdes. A l’époque archaïque, les épopées homériques étaient récitées par des rhapsodes – notamment les Homérides de Chios, qui se réclamaient les descendants d’Homère et les légataires de ses textes (Scholie à Pindare, Néméennes, 2, 1) –, rhapsodes qui, individuellement, ne connaissaient pas l’intégralité des poèmes mais seulement quelques épisodes, comme la Dolonie, Zeus Berné ou la mort de Patrocle[44]. Ainsi, aucun rhapsode ne pouvait en réalité retenir l’ensemble des 16 000 vers de l’Iliade ou des 12 000 vers de l’Odyssée. Ces longues poésies bénéficient pourtant, comme le remarquait Aristote (Poétique, 8), d’une unité d’action et d’intrigue, et se permettaient même, dans certains passages, de limiter le recourt aux expressions formulaires, pourtant si essentielles à l’improvisation aisée de l’hexamètre dactylique.[45]


Il est douteux qu’un poète ait pu, sur plusieurs jours, improviser ces longs récits tout en conservant l’unité, et que ses élèves, les rhapsodes, aient pu en mémoriser le texte sur l’instant, pour, plus tard, non plus l’improviser, mais le réciter. Douteux aussi que l’aède ait pu chanter encore et encore ses vers à l’identique pour les enseigner à ses élèves ; l’improvisation constitutive de la prestation de l’aède l’interdisait[46]. D’ailleurs, le simple fait que les Homérides de Chios se réclamaient d’un auteur et de son texte ne peut qu’être étranger à la logique de l’oralité.[47] Il est probable alors que les œuvres homériques, qui cumulent tant les marques de l’oralité que les avantages de l’écrit, appartiennent à un type intermédiaire, transitionnel, entre ces deux logiques : le texte a dû être dicté[48].


Quand a-t-il été dicté ? Question difficile à propos de laquelle il faut se retenir de toute réponse trop définitive. En estimant que la coupe de Nestor est une référence à la coupe d’or du roi de Pylos du chant XI de l’Iliade (630-645), on place volontiers la composition du poème quelque part dans la première moitié du VIIIe siècle[49]. Quant à la dictée de l’Odyssée, en y voyant un récit colonial, ancré dans le contexte des explorations en Italie, où se déroule une part de l’intrigue, on la situerait plutôt vers la seconde moitié de ce siècle[50]. Mais il n’est pas impossible de conjecturer une date plus tardive[51]. Il faut peut-être en tous cas voir dans leur enregistrement dans la lettre un phénomène orientalisant, cherchant à imiter les grandes épopées proche-orientales qui circulaient déjà, elles, par écrit.[52]


Quant à savoir, si ces deux épopées avaient le même auteur et si cet auteur s’appelait Homère, la faiblesse de nos renseignements sur sa biographie nous empêche toute conclusion[53]. Callinas d’Ephèse en connaissait en tous cas déjà le nom au VIIe siècle[54] et le mentionnait comme l’auteur de la Thébaïde (Pausanias, 10.9.5) – de fait, de nombreuses autres œuvres que l’Iliade et l’Odyssée seraient attribuées à l’aède, notamment les Hymnes homériques.


Portrait d'Homère du « type d'Épiménide », d'après une copie romaine d'un original grec du ve siècle av. J.-C. conservé à la Glyptothèque de Munich


Les poèmes hésiodiques


Hésiode, dont les Grecs faisaient volontiers un contemporain d’Homère[55], nous est en revanche mieux connu. Son poème didactique, Les Travaux et les Jours, qui se propose d’enseigner à son frère, Persès, la façon de prospérer par un travail honnête, nous fait profiter de quelques détails autobiographiques. Leur père était originaire de Cumes d’Eolide, où il tenait une entreprise de cabotage sans succès. Miséreux, il avait quitté sa ville natale et s’était rendu à Ascra, en Béotie (631-640). A sa mort, Persès avait intenté contre Hésiode un procès pour l’héritage, procès qu’il aurait gagné en « prodiguant force hommages aux rois mangeurs de présents » (trad. P. Mazon) ; au moment où Hésiode composait son poème, Persès le menaçait d’un nouveau procès, pour un motif inconnu (27-40). Les Travaux nous apprennent enfin qu’Hésiode aurait reçu son initiation à la poésie sur les pentes de l’Hélicon, pendant qu’il gardait ses moutons,[56] et aurait remporté un concours de chant à l’occasion de jeux funèbres donnés en Eubée (650-662).

« Pseudo-Sénèque » : longtemps considéré comme un buste du philosophe stoïcien, ce portrait pourrait représenter un poète archaïque, peut-être Hésiode. Copie romaine d'un original hellénistique, British Museum.


Ce dernier détail nous permet peut-être de dater sa vie : Hésiode rapporte en effet que ces jeux étaient donnés à Chalcis en l’honneur d’un certain Amphidamas, dont Plutarque nous apprend qu’il était mort lors de la guerre lélantine, que Chalcis et Erythrée se menaient (Moralia, 153F). En acceptant, avec Strabon (10.1.12), que la guerre lélantine est un évènement isolé entre deux Cités sinon amies, et non une longue série de luttes étalées sur plusieurs décennies, et en supposant que Plutarque ne se trompe pas lorsqu’il identifie l’Amphidamas d’Hésiode à celui de la guerre lélantine, on peut donc estimer que les jeux funèbres se seraient donnés soit à la fin du VIIIe siècle, soit au milieu du VIIe, selon la date qu’on veut bien donner à cette guerre obscure.[57] Hésiode doit en tous cas certainement ne pas avoir composé bien au-delà de la moitié du VIIe siècle, puisque Sémonide d’Amorgos, dont le floruit est daté d’entre 664 et 661, l’imite dans son iambe Sur les femmes[58].


Des nombreux textes que l’antiquité attribuait à Hésiode, trois seulement nous sont parvenus – exceptés quelques fragments : La Théogonie, Les Travaux et les Jours et Le Bouclier d’Héraclès. Dès l’Antiquité, l’authenticité du Bouclier a été mise en doute ; on peut se demander si ce travail, somme toute médiocre, dont les cinquante-six premiers vers sont issus du Catalogue des femmes – une œuvre aujourd'hui perdue que les anciens considéraient presque tous comme d’Hésiode –, ne serait pas la composition d’un imitateur. Les Béotiens de l’Hélicon tenaient les Travaux pour le seul texte authentiquement composé par Hésiode (Pausanias, 9.31.4), mais il semble qu’il y ait pas de raison de douter de l’authenticité de la Théogonie, d’autant que les vers 658-659 des Travaux semblent faire allusion aux vers 22-39 de la Théogonie et suggérer que ce poème, le premier qu’il ait composé, a été chanté aux funérailles d’Amphidamas.[59]


Tout comme Homère, Hésiode était un aède, qui, lui aussi, composait ses hexamètres dactyliques devant un public, en puisant dans un répertoire d’expressions formulaires, dans ce même langage artificiel de la poésie épique ionienne[60]. En cette qualité d’aède, il était un garant de la mémoire légendaire hellénique, dont le savoir s’organisait en de longues de listes de noms de divinités, souvent triées en généalogies[61] – ce qui n’empêche pas d’improviser de temps à autres quelques noms ou quelques listes[62]. Homère aussi connaissait de tels catalogues, lui qui tient, tout au long de ses poèmes, le fil des origines filiales et géographiques de ses héros et se plait, par exemple, à nous donner la liste des noms des Néréides (Iliade, 18.39-49) ou ceux des conquêtes amoureuses de Zeus (Iliade, 313-328). Quant à Hésiode, il est le généalogiste par excellence. La Théogonie n’est que le récit de la succession des générations divines. Ces listes mythologiques passent au second plan dans les Travaux, dont le propos se trouve d’abord dans les conseils pratiques sur la façon d’accomplir un travail honnête et essentiellement paysan ; mais ces conseils eux-mêmes s’organisent en de longues séries d’obligations, parfois superstitieuses, qui s’imposent au travailleur, et c’est dans ce poème qu’on trouve, notamment, le récit de la succession des races humaines (106-201) – qui a peut-être des inspirations orientales[63].


C’est avec ces listes didactiques que les enfants grecs se familiarisaient avec leurs divinités[64]. Hésiode était avec Homère l’éducateur privilégié de la Grèce[65]. Sa Théogonie fait surgir le monde avec Chaos (la Béance primordiale) puis Gaia (la Terre), le Tartare et Eros (l’Amour désirant) (116-120) ; et de la Béance naissent l’Erèbe et sa parède, Nyx (la Nuit), de qui naissent le Feu d’en Haut et la Lumière du Jour (123-125). La scène du monde est ainsi en quelque sorte posée ; la Béance est l’espace dans lequel il se déploie, le Tartare correspond à son point le plus bas, l’Erèbe à son point le plus haut et la Terre, au centre, est le sol nourricier dont la vie doit surgir. Eros apparaît quant à lui comme le principe qui rend possible la génération sexuée. Sans s’attarder à faire la liste des divinités que cite Hésiode, retenons que Gaia produit Ouranos, le Ciel, (126) qui s’accouple avec elle pour enfanter des êtres semblables aux dieux, les Titans et les Cyclopes, mais aussi les trois Hécatonchires, géants monstrueux aux cents bras et aux cinquante têtes (132-153). Tous ces enfants sont de terribles créatures, pleines de mépris pour leur père qui les maintient dans le sein de leur mère, par plaisir de la méchanceté (154-159). Cronos, son fils, l’émascule avec une serpe que lui avait donnée la Terre (173-183). Le Ciel rendu impuissant, la souveraineté ouranienne passe à Cronos ; les Titans – ses frères et sœurs – peuvent régner en dieux sur le monde. La violence faite au père n’est pas sans conséquence toutefois : à Cronos, le Ciel et la Terre annoncèrent qu’à son tour un de ses enfants le détrônerait (463-465). Peu après, de la Nuit, naissent tous les maux de l’univers : Fatalité, Mort, Sarcasme, Misère, … (211-232) Craignant à son tour ses fils, Cronos entreprend de dévorer chacun de ses enfants (459-460). Zeus seul, le cadet, est épargné, par la ruse de sa mère qui lui substitue une pierre emmaillotée (468-491). Ayant atteint sa pleine puissance, Zeus fait vomir sa fratrie à son père (495-496) et recevant la foudre, il s’empare du règne sur les dieux et les mortels (503-506). En vengeant le Ciel, et en prenant à son tour la souveraineté ouranienne, Zeus établit l’ordre définitif du monde.


Dans cette théologie, Zeus tient partout le premier rôle. De loin, il surpasse tous les autres êtres divins en puissance ; éternel, c’est à lui que revient de régler le destin de toute chose, y compris de son père, dont il avait voulu la chute, avant même sa propre naissance (465). Dans les Travaux, c’est de lui que dépend la prospérité des hommes. Être fragile, soumis à la Fatalité et à la Mort, l’homme doit lutter pour réussir, mais cette lutte, cet agon, peut être mené ou bien avec honnêteté, dans une saine émulation, ou bien dans la violence. Mais Zeus a réglé le monde des hommes selon la dikè, la justice rétributrice, et toujours assure la prospérité de l’honnête et la misère du malhonnête (213-285).


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[1] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, Paris, Belin, 2019, p. 246 (Mondes Anciens) [2] J.-C. Poursat, La Grèce préclassique, s.l., Editions du Seuil, 1995, p. 113 (Nouvelle histoire de l'Antiquité) [3] C. J. Ruijgh, « Les dialectes grecs au premier millénaire avant J.-C. », R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, Paris, Presses Universitaires de France, 2008, p. 501 (Nouvelle Clio) [4] J. N. Coldstream, Geometric Greece, Abingdon, Routledge, 2003, p. 295 [5] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 308 [6] C. Watkins, « Greece in Italy outside Rome », Harvard Studies in Classical Philology, 97, 1995, pp. 35-50, pp. 37-39 [7] C. J. Ruijgh, « Sur la date de la création de l’alphabet grec », Mnemosyne Fourth Series, 51, 6, 1998, pp. 658-687, p. 659 [8] J. N. Coldstream, Geometric Greece, op. cit., p. 296 [9] C. J. Ruijgh, « Sur la date de la création de l’alphabet grec », Mnemosyne Fourth Series, 51, 6, 1998, pp. 658-687, p. 659 ; A. Bourguignon, « Les origines de l’alphabet grec : status quaestionis », Les Etudes Classiques, 78, 2010, pp. 97-133, p. 133 [10] Ibid., p. 296 [11] R. D. Woodard, Greek writing from Knossos to Homer, New York, Oxford University Press, 1997 , pp. 138-139 [12] J. N. Coldstream, Geometric Greece, op. cit., p. 296 [13] R. D. Woodard, Greek writing from Knossos to Homer, op. cit., p. 141 [14] Ibid., pp. 140-141 [15] J. N. Coldstream, Geometric Greece, op. cit., pp. 299-301 [16] J.-C. Poursat, La Grèce préclassique, op. cit., p. 122 [17] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 309 [18] J. N. Coldstream, Geometric Greece, op. cit., pp. 298-299 [19] C. J. Ruijgh, « Les dialectes grecs au premier millénaire avant J.-C. »,R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, op. cit., p. 501 [20] A. Bourguignon, « Les origines de l’alphabet grec : status quaestionis », Les Etudes Classiques, 78, 2010, pp. 97-133, p. 119 [21] Ibid., p. 109 [22] C. J. Ruijgh, « Les dialectes grecs au premier millénaire avant J.-C. », R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, op. cit., p. 501 [23] C. J. Ruijgh, « Sur la date de la création de l’alphabet grec », Mnemosyne Fourth Series, 51, 6, 1998, pp. 658-687, p. 660 [24] A. Bourguignon, « Les origines de l’alphabet grec : status quaestionis », Les Etudes Classiques, 78, 2010, pp. 97-133, p. 110 [25] J.-C. Poursat, La Grèce préclassique, op. cit., pp. 123-124 [26] J. N. Coldstream, Geometric Greece, op. cit., p. 295 [27] A. Bourguignon, « Les origines de l’alphabet grec : status quaestionis », Les Etudes Classiques, 78, 2010, pp. 97-133, p. 117 [28] Ibid., p. 113, p. 126 [29] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 307 [30] Ibid., p. 310 [31] A. Bourguignon, « Les origines de l’alphabet grec : status quaestionis », Les Etudes Classiques, 78, 2010, pp. 97-133, p. 117 [32] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 309 [33] Je reprends ici les qualités qu’Hippias attribue, en superlatif, à Achille, à Nestor et à Ulysse, respectivement. Cf. : Platon, Hippias Mineur, 264c [34] Les Chants cypriens, attribués à Stasinos, très populaires à l’époque archaïque narraient différents épisodes qui précédaient la guerre de Troie. L’Ethiopide racontait la mort d’Achille, la Petite Iliade l’épisode du cheval de bois, l’Iliou Persis la prise de la ville. La Télégonie faisait quant à elle le récit des péripéties de Télégonos, fils d’Ulysse et de Circé. Il existait aussi un poème épique, la Titanomachie, racontant le combat des dieux et des Titans avant l’avènement de Zeus. Cf. : C. Baurain, Les Grecs et la Méditerranée orientale, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, pp. 325-326 (Nouvelle Clio) [35] C. Baurain, Les Grecs et la Méditerranée orientale, op. cit., pp. 341-344 [36] Voir notamment : 9.410-416 [37] Cf. le travail fondateur de M. Parry : L’épithète traditionnelle dans Homère, Paris, Les Belles Lettres, 1928 ; ainsi que A. Lord, The singer of tales, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 2000 [38] C. J. Ruijgh, « La langue homérique »,R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, op. cit., pp. 494-495 [39] A. Meillet, Les origines indo-européennes des mètres grecs, Paris, Presses Universitaires de France, 1923, p. 62 [40] C. J. Ruijgh, « La langue homérique »,R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, op. cit., pp. 495-496 [41] Ibid., p. 494 [42] C. J. Ruijgh suggère d’ailleurs que la construction de tout ce vers, qui effectue également une crase surprenante entre un ω et un α, a été le résultats de transformations qu’il aurait subies au plus tard au début de l’époque Mycénienne. Le proto-grec ἀνr̥χwόντά fonctionne en effet beaucoup mieux dans le rythme de l’hexamètre mais le traitement de ἀνr̥- en ἀνδρο-, naturel au dialecte proto-achéen des Mycéniens, aura créé un déséquilibre qui rendit nécessaire ces manipulations artificielles. Si cette explication est exacte, ce vers remontrait ainsi au plus tard au XVe siècle. Cf. : C. J. Ruijgh, « La langue homérique »,R. Treuil, P. Darcque, J.-C. Poursat, G. Touchais, Civilisations égéennes, op. cit., p. 497-498 [43] Sur les origines indo-européennes des vers grecs, cf. : A. Meillet, Les origines indo-européennes des mètres grecs, Paris, Presses Universitaires de France, 1923 ; sur les origines de l’hexamètre dactylique : pp. 57-71 ; sur les dialectes utilisés par l’épopée : C. J. Ruijgh, « D’Homère aux origines proto-mycéniennes de la tradition épique », Homeric Questions, 1995, pp. 1-97. [44] Ces épisodes étaient au départ chantés indépendamment les uns des autres, sans respect particulier de leur ordre. A Athènes, une loi du VIe siècle aurait prescrit aux rhapsodes venus faire leur prestation aux Panathénées de chanter ces épisodes les uns à la suite des autres. Selon Diogène Laërte, cette loi serait à mettre au crédit de Solon (1.57), selon Cicéron, à celui de Pisistrate (De oratore, 3.34), selon Platon, à celui d’Hipparque (Hipparque, 228b). [45] S-T. Theodorsson, « Eastern Literacy, Greek Alphabet, and Homer », Mnemosyne, 59, 2, 2006, pp. 161-187, p. 179 [46] Ibid., p. 180 [47] Ibid., p. 176 [48] Ibid., pp. 179-180. [49] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 309 [50] Ibid., p. 323 [51] Une autre proposition voudrait que les épopées homériques n’aient reçu leur ordre et leur unité qu’au VIe, quand Athènes impose aux rhapsodes d’en chanter les épisodes selon une suite logique et linéaire (supra note 44). [52] S-T. Theodorsson, « Eastern Literacy, Greek Alphabet, and Homer », op. cit., p. 182-185 [53] Le nom d’Homère pourrait être une construction artificielle signifiant « celui qui ne voit pas » (ὁ μή ὀρῶν, ho mè horon) ou « assembleur » (ὁμόσ, homos, « similaire », ἀραρίσκω, ararisko, « ajuster », « jointer ») : B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 321. Sur le sujet : L. Deroy, « Le nom d’Homère », L’Antiquité Classique, 41, 2, 1972, pp.427-439 [54] B. Le Guen (dir.), M. C. D’Ercole, J. Zurbach, Naissance de la Grèce, op. cit., p. 320 [55] Une tradition, qui a été conservé par un texte du IIe siècle de notre ère, Dispute d’Homère et d’Hésiode, mettait en scène leur agôn lors d’une compétition de chant. Cf. : P. Mazon, Hésiode, Paris, Les Belles Lettres, 1947, pp. X-XI (Guillaume Budé) [56] Voir aussi La Théogonie, 22-34 [57] A l’appui d’une date à la fin du VIIIe siècle, citons l’abandon de l’habitat de Xéropolis à Lefkandi, située dans la plaine lélantine, vers 710 et la construction à Erythrée – dont on a vu le lien avec Lefkandi (cf. article précédent) – d’un heroon pour recevoir le corps des guerriers. A l’appui du VIIe, on peut prendre argument de ce que Thucydide (1.13.4) situe la plus vieille bataille navale, entre Corinthe et Corcyre, aux alentours de 681 ou 664 : or, Amphidamas serait mort lors d’une bataille navale, donc, a priori, postérieure à l’une de ces dates. Cf. : R. Janko, Homer, Hesiod and the hymns, Cambridge, Cambridge University Press, 1982, pp. 94-96 [58] Ibid., pp. 96-98 [59] Cf. : P. Mazon, Hésiode, op. cit., 119-122 (Guillaume Budé) ; M. L. West, Hesiod, New York, Oxford University Press, 1988, pp. xii-xiii [60] M. L. West, Hesiod, op. cit., pp. VIII-IX On a pu proposer que ces listes chez Hésiode étaient un phénomène nouveau, cherchant à systématiser la généalogie et les rapports des dieux, ce sous l’influence des poèmes orientaux, notamment l’épopée cosmique suméro-babylonienne Enuma Elis. Toutefois, dans l’incapacité où nous sommes de nous faire une idée des récits mythiques qui avaient cours avant Hésiode, il est difficile de tenir une telle conclusion. Cf. : C. Baurain, Les Grecs et la Méditerranée orientale, op. cit., pp. 440-444 [61] J.-L. Backès, Hésiode, s.l., Gallimard, 2001, pp. 13-17 (Folio Classique) [62] M. L. West, Hesiod, op. cit., p. x [63] Ibid. , pp. xvi-xvii [64] J.-L. Backès, Hésiode, [65] Je reprends ici l’expression que Platon applique à Homère, cf. : République, 606e

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